Hommage à Folon

« Lointains un Homme » (suite Lointains) – 1986
Eau-forte et aquatinte (Cl : Gérard Robin)

« La Gravure dans tous ses états »
Salle de la Sablonnière
rue de la Cave de Châtenoy 77140 Larchant
du 5 au 20 novembre 2022

Dans le cadre des « Rencontres de Larchant en pays de Nemours », une manifestation ambitieuse et réussie que celle proposée par Laurence Manesse Césarini et la mairie de Larchant, village rural du Sud Seine & Marne (77140), qui enserre une basilique remarquable, et qui fut jadis, à l’époque médiévale, un relais d’étape sur la route de Compostelle. Et sous le titre : « La Gravure dans tous ses états », fut donné un bel hommage à Jean-Michel Folon, avec présentation de 46 estampes (en partie sous la forme d’état ou de bon à tirer) et des vitrines renfermant divers objets portant son empreinte graphique.

Deux espaces étaient dédiés à l’artiste, un troisième étant consacré à un ensemble de onze planches sur l’historique de la gravure, de son lointain passé à aujourd’hui, le temps présent s’exprimant de surcroit au travers de quelques tailles d’épargne à la gouge sur le Jazz dues à Stéphane Lalou, dernier graveur de Folon, ainsi que de portraits d’écrivains par Pierre Colombier, gravés dans une liberté technique plurielle très personnelle, cela en correspondance avec leurs écrits.

De g. à dr. : Pierre Colombier, Gaëtan Saint-Rémy, Daniele Folon, Stéphane Lalou, Laurence Manesse Césarini et Vincent Mével. (Cl. Gérard Robin)

Lors du vernissage, en présence de Danièle, la sœur de Folon, du maire Vincent Mével et de diverses personnalités du département, le public fut nombreux et séduit, une audience qui perdura dans les diverses séquences de la manifestation, avec entre autres : de la musique avec le quatuor à cordes Zadkine lors du vernissage, des démonstrations de gravure, une conférence intitulée « Quand Semprun retrouve Folon, il est question de Walter Benjamin », donnée par l’organisatrice, dissertant sur l’authenticité de l’œuvre d’art ; une performance en musique, « La geste du graveur », signée Stéphanie Hésol et Sergio Capasso. Mais aussi la visite de grottes ornées à proximité, qui nous ramènent aux premiers gestes de gravure, sans doute au Mésolithique… Déjà tout un programme de qualité, en l’honneur du maître !

On sait que Jean-Michel Folon (1934-2005), ayant quitté la capitale, vécut un certain temps à Burcy, petit village situé non loin de là. Depuis plusieurs années, l’église est ornée de vitraux dont il a dessiné les motifs, cadeau fait au village en échange de la destruction du château d’eau jouxtant celle-ci. Mais le point d’orgue de l’hommage fut la projection, en avant-première en France, les 6 et 19 novembre, ― la première mondiale ayant eu lieu en mars dernier au FIFA de Montréal ―, d’un portrait intime et singulier de l’artiste, documentaire réalisé par l’auteur et réalisateur Gaëtan Saint-Rémy, et projeté en sa présence.

« Janvier 1992 (détail) », Eau-forte avec aquatinte, (Cl. Gérard Robin)

Une évocation qui donne parole à l’artiste, dans une narration cinématographique qui ne se veut pas classique et organique, c’est-à-dire basée sur une chronologie sur la vie et l’œuvre, mais recomposée selon le choix de l’auteur au travers d’archives radio et télévisuelles. Une démarche personnelle, mais dans un choix d’images et de sons choisis pour exprimer, d’une manière plus profonde, la sensibilité de l’artiste, et d’opérer finalement pour le public une rencontre intime avec lui. S’y ajoutent les commentaires de proches, comme Danièle Folon et Colette Portal, sa première épouse, ainsi que de personnalités qui l’ont bien connu comme Rufus, Pierre Alechinsky,… ou encore la galeriste Cristina Taverna, qui dit qu’ « il y a dans son œuvre un silence qui parle beaucoup »

Et Jean-Michel Folon de se raconter dans sa découverte de la maison de Burcy, un lieu en bordure de champs dont il apprécie justement le grand silence avec son atelier ouvert sur la ligne d’horizon. Cadre propice à une création où les couleurs généralement en légèreté et transparence disent souvent des choses plus graves qu’elles n’y paraissent, des couleurs dont il aime aussi qu’elles se rencontrent jusqu’à vivre ensemble des instants d’amour. Cela avec la volonté, dans un monde où se côtoient l’injustice et la laideur, mais aussi la beauté, de choisir cette dernière pour rester positif et surmonter les drames personnels de la vie et participer à lutter contre ceux sociétaux, lorsqu’ils se présentent…

Un grand personnage, aux multiples facettes, tout de simplicité et d’empathie pour autrui, que j’ai eu le privilège, il y a bien des années, de rencontrer à Burcy et de l’interviewer. Un souvenir à partager, peut-être… (voir ci-dessous1)

Gérard Robin

1L’entretien avec Jean-Michel Folon a été publié en 1997 par la revue municipale de Saint-Pierre-lès-Nemours, pour en télécharger le facsimilé au format PDF cliquez sur ce lien : https://www.manifestampe.net/public-doc/Entretien-Folon-Robin.pdf