Des caractères

Sans prétendre à être ceux de La Bruyère, les petits caractères imprimés, qui les font vivre typographiquement, composent un ménage avec l’estampe depuis son origine. Ils disent ainsi toute la consanguinité qui perdure entre le livre imprimé et l’estampe. Car, l’une et l’autre s’abreuvent à la même eau : le signe porteur du sens. Que ce signe soit des lettres, idéogrammes ou hiéroglyphes ou soit le graphe incisé d’une image.

Les caractères de l’écriture alphabétique, pour se cantonner au seul monde occidental, constituent souvent une part plus ou moins significative de l’image portée par l’estampe. Du monogramme d’Albrecht Dürer si semblable, tout anachronisme mis à part, à un tori japonais dans son élégance graphique, aux eaux-fortes de Jacques Callot avec les lettres de leur légende gravées dans la matrice, en capitales romaines ou en cursives calligraphiées, légende dont celle de sa dernière estampe représentant un banquet sous une treille, tracée par ses compagnons, est si émouvante : «La dernière planche gravée par le deffunt Callot, a laquelle l’eau forte n’a esté donnée quapres sa mort.»Pour lire la suite “Des caractères”

Variations sur ma gravure

Nota bene : les citations entre guillemets et en italiques sont extraites du texte de Paul Valéry portant ce titre.

Valéry fut «un graveur occasionnel et intermittent», mais il fut néanmoins suffisamment graveur pour consigner son expérience dans un petit texte Variations sur ma gravure. C’est un texte de commande pour une édition de luxe (l’Orfèvrerie Christofle) paru en 1944, que les éditions Pagina d’Arte ont republié en 2009.

Frontispice de ce texte (Cl. Institut de France)

Pour introduire «sa manière de confession», Valéry rappelle le choix qui s’impose «dans la morale des arts» : tout poète, qu’il travaille la langue ou l’image, doit choisir l’insouciance de l’inspiration ou les rigueurs d’une œuvre construite.… Pour lire la suite “Variations sur ma gravure”

Disette respiratoire

En ces temps de disette respiratoire, amis graveurs, l’apnée du sommeil nous guette.
Qui n’a pas, dans un tracé préparatoire délicat, retenu son souffle ?
Qui n’a pas, dans un grattage, brunissage d’une manière noire ou aquatinte, suspendu les « pompes » de son diaphragme ?
Qui n’a pas, dans une courbe délicate, dans une ligne droite qui n’en finit pas, taillé à l’avant d’une pointe sèche, à l’arrière d’un burin, thésaurisé son gaz carbonique alvéolaire ?
Qui n’a pas, au pinceau trois poils ou plus, sur une eau-forte, une aquatinte, en surface ouverte, fermé la « soupape » respiratoire, afin de tenter d’atteindre une subtilité improbable ?… Pour lire la suite “Disette respiratoire”