Agathe May

exposition Agathe May
Palais de l’Institut de France
Salle Comtesse de Caen, 27 quai de Conti 75006 PARIS
www.academie-des-beaux-arts.fr
11 mai – 11 juin 2017
Du mardi au dimanche de 11h à 18h
Entrée libre

Prix Mario Avati

Agathe May est la lauréate de la quatrième édition du Prix Mario Avati – Académie des beaux-arts (destiné à couronner des graveurs confirmés dans les arts de l’estampe), décerné en octobre 2016. Un des avantages de ce prix est constitué par une exposition personnelle dans la spacieuse salle Comtesse de Caen.
La plupart des pièces présentées sont très spectaculaires. Certains thèmes à la mode, comme la manière négligente avec laquelle nous traitons notre environnement (Après nous le déluge, La boîte de Pandore) attirent évidemment notre regard pensif, mais même les estampes qui (une bonne partie de l’exposition) traitent de sujets plus intimes (portraits de la fille de l’artiste, de son mari, de ses amis), atteignent à une certaine universalité par la puissance de leur exécution.

Dans l’exposition Agathe May, 12 mai 2017 (Cl. Michel Nguyen)

Taille d’épargne expressive

Il ne s’agit ici que de gravures en taille d’épargne, linogravure et surtout bois, imprimées manuellement, en couleurs le plus souvent, chaque tirage étant apparemment unique, plusieurs estampes pouvant être découpées, assemblées, collées et superposées de manière à produire une ou des nouvelles images. Certains cartels portent la mention très chic et quelque peu obscure (on est tout de même à l’Académie) de « xylographie à encrage monotypique ». Mais ce n’est évidemment pas à ce vocabulaire-là qu’il faut s’attacher. Mieux vaut se laisser aller, comme on le devine chez la petite fille accompagnée d’un pigeon considérant l’immense volière (Haute et Basse-cour, 2012-2013) qui occupe presque tout le mur sud de la galerie, à un sentiment de surprise amusée.

Agathe May, Haute et Basse-cour, 260 x 245 cm, 2013-1014

En complément à cette magnifique présentation, on lira avec curiosité, dans le dernier numéro des Nouvelles de l’estampe (n° 258, printemps 2017, p. 32-41), « Agathe May ou le Monde en profondeur. Propos recueillis par Cécile Pocheau-Lesteven », où plusieurs estampes sont reproduites.

Maxime Préaud

Recettes estampées, tome II

L’estampe et Chaville

Cette commune de la banlieue ouest, sise entre la forêt de Meudon et celle de Fausses-Reposes, était plus connue dans les années cinquante-soixante du siècle passé, grâce à Pierre Destailles, par le muguet de sa chanson : défilé fleuri annuel, chars et fanfares ! Mais, comme le muguet des bois se faisait de plus en plus rare dans les alentours, cette notoriété printanière déclina et disparut.

Elle renaît aujourd’hui non pas par la grâce des petites clochettes parfumées mais par celle de l’atelier de gravure fondé en 1977 par le grand prix de Rome : Claude Bouscau, et continué depuis par André Bongibault qui l’anime maintenant et que soutient l’association : « Estampe de Chaville ».

Où mène la gastronomie !

Dans cet atelier, qui rassemble des apprentis artistes graveurs et des pointures confirmées, s’est établie au fil du temps une agréable coutume : chaque samedi, les membres de l’atelier partagent un repas où l’on déguste les plats concoctés et apportés par chacun. Cette convivialité est d’ailleurs fort répandue parmi les estampières et estampiers de France et de Navarre qui refusent rarement en ces occasions un hommage à la dive bouteille.

De cette tradition, bien établie et respectée attentivement à Chaville, est née l’idée de rassembler les recettes des mets délectables dont on se régale céans chaque samedi dans un livre dit d’artistes. Ce qui fut dit après boire fut fait. La règle fondatrice était des plus simples : chaque artiste était invité à proposer une recette originale ou pas, mais pas trop sérieuse, mijotée avec son illustration originale, gravée et estampée à feu vif et pressée sur une double page à l’italienne, comme la cuisine du même nom, ouverte de 25 à 50 centimètres sur un papier Hahnemühle de 300 grammes.

Recettes estampées I

Dans le premier tome de ce livre, figurèrent donc les meilleures recettes sélectionnées parmi les nombreuses propositions émanant des cuisines de l’atelier après dégustation des mets élaborés à partir de celles-ci. Le portfolio les reliant portait un titre bellement gravé et imprimé en bleu. Sorti des feux à 70 exemplaires numérotés, il s’ouvrait sur un premier service dont la cloche résonnait dans les couloirs du sleeping Nord-Paris-Méditerranée. On pouvait choisir sur la carte de ce tome I la simplicité succulente et coulante d’un œuf à la coque ou déguster avec gourmandise et lenteur une soupe cosmique ou bien poursuivre outre Méditerranée le voyage exotique avec un estampadon à la pékinoise.

Il va de soi que les soixante-dix convives attablés et alléchés terminèrent vite ce banquet, que le couvert fut rapidement desservi et le tirage, comme les serveurs, épuisé.

« Recettes estampées – tome II »  (Cl. Estampe de Chaville)

Recettes estampées, tome II

Devant un tel succès, l’atelier de Chaville décida de remettre le couvert mais, cette fois, sans sélection préalable, avec des maîtres queux volontaires. Onze artistes graveurs ont répondu à l’appel de nos appétits. L’estampe de Chaville propose ainsi le tome II de ces recettes estampées, toujours sur papier Hahnemühle mais avec un titre en rouge, toujours avec soixante-dix places, ouvertes maintenant pour un deuxième service qu’il ne faut pas rater avant l’arrivée en gare.

Confortablement installé, pour un menu gastronomique à 150 €, on pourra se faire péter la sous-ventrière avec dix plats. Sans s’abandonner à cette extrémité, pour le même prix, on pourra se contenter, d’une entrée : Escargot de Bourgogne à la Szenberg, d’un plat de résistance : Turbot croustillant sauce Grand Duc Dodon et d’un dessert : Tarte aux rares cerises bataves Van Der Veken. Le tout, bien entendu, mais non compris et en sus sur la carte des vins, accompagné d’un nectar idoine.

Le lancement de ce tome II de recettes estampées mais néanmoins typiquement chavilloises s’est fait, du 24 au 30 avril 2017, au siège de Manifestampe, adresse renommée et bien connue des gourmets, sise au 5 de la rue Pierre Sémard à Paris 9°.

« Escargot… tome II » (Cl. Estampe de Chaville)

Comme quelques cartes complètes ont été réservées à l’issue de ce premier voyage du tome II, un autre banquet champêtre est prévu à l’occasion de la Fête de l’estampe à Chaville, du 26 au 28 mai 2017, au 918 avenue Roger Salengro, de 14h à 19h, entrée libre.

Claude Bureau

Très portraits

Collection Judith Pillsbury, présentée à Maubeuge (Nord)
29 avril – 14 mai 2017

Parmi les diverses manifestations culturelles qui animent la vie de la riante petite cité nordiste de Maubeuge, il faut évidemment citer celles qui sont organisées régulièrement depuis vingt ans par l’association Malbodium Museum. Malbodium est le nom très ancien de Maubeuge ; mais ses habitants sont naïvement appelés les Maubeugeois.

Une association dynamique

L’association a été créée en 1996, à l’initiative de l’infatigable Roland Plumart, grand amateur d’estampes, qui se dépense sans compter pour mettre en valeur les arts de l’image imprimée, que ce soit au musée de Gravelines, qui n’est pas très éloigné, ou dans sa ville natale. Il a été aidé en cela par les présidents de ladite association, Jean Dennetière et Bélisaire Fauconnier, et depuis 2007 par Daniel Boulenger dont l’enthousiasme communicatif et la voix de stentor lui permettent d’être clairement entendu et soutenu financièrement par les édiles maubeugeois. Une exposition prévue pour le prochain automne, intitulée « Les quatre lustres du Malbodium Museum », rendra compte de l’activité considérable de cette équipe : quarante-sept expositions, avec l’édition de quarante-sept catalogues afférents et de cinq portefeuilles d’estampes (près de quatre-vingt-dix pièces, allant d’Avati à Wallerand, auxquelles s’ajoutent quelques photographies).

Après avoir longtemps ─ jusqu’en 2012 ─ occupé l’ancien Arsenal de Maubeuge, les manifestations sont maintenant accueillies dans le bâtiment de la Porte de Mons, dont la ville est redevable à Vauban depuis 1682. Il a été construit avec les matériaux traditionnels de l’Avesnois, c’est-à-dire brique et pierre bleue, et il a vraiment de la gueule. Les expositions se tiennent à l’étage supérieur, dans ce qu’on appelle la Salle Haute, sous une charpente impressionnante.

Maubeuge, la Porte de Mons (Cl. M. Préaud)

L’art du portrait estampé

Depuis le samedi 29 avril jusqu’au dimanche 14 mai 2017, la Salle Haute présente sur ses cimaises un remarquable ensemble de quatre-vingt sept portraits exécutés selon les diverses techniques de l’estampe depuis à peu près les origines de la taille-douce jusqu’à nos jours. Toutes ces pièces ont été réunies, au fil d’une quarantaine d’années, par Judith Pillsbury. Cette Américaine installée en France depuis longtemps s’est passionnée pour l’estampe au point d’en avoir fait le commerce pendant un moment. Mais quand on achète ce qu’on aime, il devient douloureux de vendre.

L’exposition est très réussie, on ne s’ennuie pas une seconde. Elle ne se veut pas pédagogique, je dirais presque au contraire, car les différentes pièces se succèdent sur les murs sans ordre apparent, et c’est beaucoup mieux ainsi car cela permet des surprises, des chocs, des rencontres inattendues. En outre, la diversité des techniques et des manières de les utiliser ravive, ou devrait raviver, l’intérêt que l’on peut porter à cet extraordinaire moyen d’expression qu’est l’estampe.

La Salle Haute : portraits par Chuck Close
entre ceux par Manet à gauche et Picasso à droite
(Cl. M. Préaud)

Un catalogue a été édité (Très portraits. Collection Judith Pillsbury, estampes de Dürer à Sécheret. Préface de Maxime Préaud, Maubeuge, Éditions Malbodium Museum, 2017, in-4°, 183 p.), qui présente l’avantage que, pour chaque pièce (toutes les estampes sont reproduites), Judith Pillsbury raconte en quelques mots les circonstances et les raisons de son acquisition. Une édition de tête, tirée à cinquante exemplaires, est enrichie de deux portraits de la collectionneuse, l’une par son fils Matthew Pillsbury, qui est un photographe reconnu, et l’autre, en lithographie, par Jean-Baptiste Sécheret, qu’on ne présente pas.

Maubeuge est à deux heures dix de Paris, en train, et la Porte de Mons à un quart d’heure à pied de la gare. L’exposition est ouverte tous les jours (sauf le lundi) de 14 à 18 heures. Entrée libre.

Maxime Préaud