Jullien-Clément
Rétropective de six ans de gravure
24 août – 4 septembre 2018
Orangerie du Sénat, Paris.
Située sur la partie ouest du jardin du Luxembourg s’ouvre l’Orangerie du Sénat commandée par la régente Marie de Médicis, alors veuve de Henri IV, lors de l’érection du Palais du Luxembourg, aujourd’hui siège du Sénat. Plusieurs orangeries se succédèrent au fil du temps. Le bâtiment présent, qui date de 1839, abrite aujourd’hui chaque hiver, sous d’amples verrières, plus de 200 plantes exotiques. L’été, celles-ci retrouvant place dans le jardin, le lieu accueille des expositions temporaires d’art contemporain, une initiative datant du XVIIIe siècle. Aucune lumière artificielle à l’intérieur pour éclairer les œuvres, seule la lumière naturelle, animée par le passage des nuages devant le soleil, donne une clarté environnante homogène des plus agréables.
Cette année, parmi les exposants, se trouve un graveur notoire d’origine marseillaise, monté spécialement du Var où il réside, pour présenter une rétrospective de six ans de gravure.
C’est Jean-François Jullien, dit Jullien-Clément. Habituellement, je consacre ma plume à des expositions de groupe, je fais cette fois une exception. À vrai dire, lorsque l’on parcourt ici les cimaises, où près de 70 œuvres s’offrent au regard, on y fait, côtoyant un ou deux autoportraits, la rencontre de personnalités incroyables, dans la cohabitation et le choix faits : Pascal, Dante, Nostradamus, Kafka, Goya, Don Quichotte ; sans oublier quelques musiciens : Pavarotti, Berlioz, Bach, Beethoven, Mozart, et même John Lennon…
“Confrontation aux quatre autoportraits”
(pointe sèche sur plexiglas)
de Jullien-Clément (Cl. Gérard Robin)
Donc beaucoup de monde traversant l’intimité intellectuelle de l’artiste, qu’évoque une gravure foisonnante et flamboyante où se croisent plusieurs techniques, de la taille-douce à la taille d’épargne, en particulier l’eau-forte sur zinc ou sur cuivre, agrémentée d’aquatinte et de roulette ; la pointe-sèche sur plexiglas ; et quelques linogravures. Ces personnages accompagnent une évocation estampière d’une grande richesse de pensée, alchimie picturale complexe mêlant gravité, souvent, et humour, où l’artiste se dévoile.
Une vue de l’exposition (Cl. Gérard Robin)
Il faut dire que Jullien-Clément, autodidacte d’une gravure qu’il a découverte il y a peu, – conformément au titre de sa rétrospective -, avait été auparavant, durant une quinzaine d’années, sculpteur et fondeur d’art. Il semble que ces techniques, qu’il affectionnait, se révélèrent cependant réductrices face à la dimension de son imaginaire et aux messages critiques ou oniriques qu’il souhaitait partager… Il ne pouvait tout exprimer en trois dimensions. Et l’estampe bidimensionnelle, avec le geste libre de la pointe, lui ouvrait d’autres champs de création mentale, bien plus amples et ouverts. Cela avec une verve que je qualifierais “hugolienne”.
Une gravure dense, à découvrir et à lire.
Gérard Robin