« Écueil » burin d’Olaf Idalie (Cl. Fondation Taylor)
La Fondation Taylor consacre aux travaux gravés d’Olaf Idalie une belle exposition que cet artiste bien connu du monde de l’estampe mérite depuis longtemps. Son prénom rare sous nos latitudes l’a aussi fait remarquer ; il est vrai que sa mère s’appelait Zoé Oldenbourg, historienne et romancière distinguée (prix Femina en 1953).
Nombre de stampassins parisiens naguère, bordelais ou girondins aujourd’hui, savent son talent d’imprimeur en taille-douce — ce qui lui permet de présenter au public des estampes impeccablement tirées. On sait qu’il a enseigné à l’École Estienne. Ce qu’on connaît moins, ce sont les études qui ont précédé ce penchant pour l’estampe. Je peux aujourd’hui dénoncer qu’il a été en classe de seconde au lycée Claude B. le chouchou de Carnifex (i. e. « bourreau » en latin), prof de français-latin-grec, un nabot d’une méchanceté rare que l’auteur de ces lignes haïssait mortellement. Bref, Olaf, d’une certaine manière, est un artiste complet, puisqu’il peut joindre à son talent graphique un minimum de culture humaniste que ne détiennent pas toujours, j’ai le regret de le dire, nombre de ses émules.
Une vue de l’exposition (Cl. Maxime Préaud)
Quant à ses estampes, elles méritent l’attention, ne serait-ce que par leur originalité. Elles sont gravées d’un burin souple, qui s’engraisse quelque peu avec le temps, et parfaitement aiguisé (Olaf a toujours été très affûté). Il n’aime pas beaucoup les teintes, leur préférant la beauté du trait pur ou presque — pas de hachures, presque pas de tailles croisées —, c’est un adepte de la ligne claire.
Une autre vue de l’exposition (Cl. Maxime Préaud)
Ses sujets naissent, semble-t-il, au moment même de l’incision. Personnages, animaux — souvent des chevaux ou des chiens — viennent naturellement sous sa lame, efflanqués souvent, inachevés parfois, s’entremêlant à de curieuses mécaniques qui tiennent du robot. Mais ce sont des images qui se regardent de près, où, sous une apparence purement linéaire, de temps en temps à la limite du style nouille, se découvrent des bizarreries qui poussent à les regarder encore : que viennent faire cette fourchette et ce couteau dans l’« Essai pour Icare » ? La scie à métaux dans « Olibrius » se comprend davantage, puisqu’on est un peu dans la ferraille, et de toute façon ces images nous proposent le plaisir de l’interrogation renouvelée.
Maxime Préaud