Le papier du papier

« Le papier du papier »
Sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI
À l’occasion du quarante-quatrième Moussem Culturel International d’Assilah
Galerie du Centre Hassan II des Rencontres Internationales
8 au 30 Octobre 2023

La ville d’Assilah, à quelques kilomètres de Tanger (Maroc), organise depuis quarante-quatre ans un festival où se réunissent écrivains, philosophes, politiciens et artistes de toutes nationalités. Le « Moussemd’Assilah » rassemble, dans ses ateliers d’arts plastiques, des artistes de différentes nationalités invités en résidence pour partager leurs compétences dans leurs différents domaines d’expression.

Dans ce cadre du Moussem 2023 Said Messari, artiste marocain de Tétouan , vivant à Madrid et curateur de l’atelier de gravure du Moussem, montre à la galerie du centre Hassan II son travail très particulier d’estampes et de papier dans une exposition intitulée « Le papier du papier ». Cette exposition s’accompagne de la présentation du livre « Suleimán y Salúa »1 de Ali Ali, lithographe syrien vivant en Espagne.

Said Messari, fort d’une expérience technique pointue acquise par des années d’impression au service de la maison d’édition Repro-Art à Madrid, a créé son propre atelier et développé un travail plasticien très particulier sur le papier et l’impression qui emporte l’estampe au-delà de ses limites habituelles. Outre ses activités de transmission dans différentes institutions espagnoles, sa présence dans de nombreuses résidences d’artistes, il publie aussi des écrits sur ce travail du papier et de l’estampe comme forme à part entière du travail plasticien.

Comme une profession de foi dans la noblesse du papier et de l’estampe, l’artiste proclame en exergue du catalogue de cette exposition « La gravure n’est pas la sœur orpheline de la peinture » ! Ses recherches tournent autour de deux axes : le travail du papier comme matériau même de son expression, de ses rapports avec l’encre, et le papier comme support d’estampes incluses dans une œuvre plus monumentale. Mais dans tous les cas l’impression du papier, en couleur ou en gaufrage, reste un fondamental de cette expression qui veut sortir un travail de gravure protéiforme des cadres qui lui sont habituellement assignés.

Il fabrique le papier, mis en forme, en couches, trituré, malaxé, imprimé, maltraité mais toujours magnifié. Il fabrique la gravure, d’abord imprimée en taille-douce à partir d’anciennes grandes plaques d’offset gravées au sulfate de cuivre, il l’emmène dans d’autres contrées plus aventureuses de l’expression picturale.

Dans ses dernières œuvres présentées à Assilah, Said Messari explore la possibilité de mettre en forme le papier imprimé en taille-douce pour qu’il devienne sculpture ou installation tout en conservant sa nature première d’estampe.

Estampes en volume – « Gira-Sol II » (Cl. P. Simonet)

Ce travail qui cherche sans cesse à repousser les limites de l’utilisation de l’estampe comme moyen d’expression plasticienne, Said Messari l’inscrit dans une thématique constante qui veut dire la disparition du monde mais aussi sa réapparition. Les travaux de Said « donnent à dévoiler autant qu’ils créent le voile »2 Dans les couches de papier mises l’une sur l’autre, mises côte à côte, dans l’inscription imprimée ou estampée du monde, l’artiste dévoile une mémoire sans cesse répétée, oublis et souvenirs mêlés.

L’œuvre « Profil » (Cl. P. Simonet)

En dehors de son travail personnel qui l’habite entièrement, Said Messari, homme de partage et de communication, cherche toujours à transmettre sa passion et à entraîner les artistes qu’il rencontre, de par le monde, sur les routes intrépides des formes contemporaines de l’estampe.

Pascale Simonet

1 – Livre composé de 21 lithographies – exemplaire unique – 173 x 87 x 10 cm- 2012, Illustrations inspirées des écrits de Francisco X. Fernandez Naval.
2 – « Said Messari – L’invisible », préface de Philippe Guiguet Bologne in Catalogue de l’exposition « Le papier du papier ».