Clémence Fernando

« Cent 1000 milliards de planètes » affiche de l’exposition

Clémence Fernando présente « Cent 1000 milliards de planètes » à la médiathèque Romain Rolland de Romainville. Le titre de l’exposition fait un clin d’œil au livre « Cent mille milliards de poèmes » de Raymond Queneau. Le poète et l’artiste graveuse mettent à l’œuvre la même démarche combinatoire : là où Queneau combine des vers pour générer des sonnets, Fernando combine des estampes pour générer des œuvres de grand format.

Dans cette exposition (qui est la première partie d’une résidence à l’atelier Bo Halbirk soutenue par la région Île de France), Clémence Fernando utilise 4 séries de 9 matrices gravées à la manière noire de 30 par 30cm (soit 36 matrices) ; elle compose dans une grille neuf images qu’elle obtient au moment de l’impression en superposant les matrices encrées dans différentes couleurs.

Elle obtient des œuvres qui sont plus des tableaux que des estampes et que j’appelle des panneaux en référence aux panneaux d’autel de la Renaissance ; ils sont de dimension 124 par 108 cm. Elle en présente 25 dans les beaux espaces de la médiathèque. L’un d’entre eux revient tout juste du musée des beaux-arts de Taishung à Taïwan où il était exposé dans le cadre de la Biennale internationale de la gravure. Fernando y avait été couronnée en 2022 avec une estampe tirée de la série 54 qui est la préfiguration de la série actuelle.

Une vue de l’exposition (Cl. Jean-Marie Marandin)

La démarche de Clémence Fernando allie une très grande maitrise technique de la manière noire à l’aléatoire des choix effectués au moment de l’impression, le très grand nombre d’images que la combinatoire rend possible (le nombre est astronomique !) à la singularité de chaque panneau. Ce qui frappe dans cette nouvelle série, c’est la lumière qui émane de chaque panneau : certains donnent l’impression d’être des vitraux. Cette lumière, c’est celle du papier que l’usage de la manière noire magnifie. On se prend à imaginer qu’elle est la lumière fossile qui irradie le cosmos dans lequel évoluent les mille milliards de corps célestes qu’évoque le titre.

Un des panneaux de l’exposition (Cl. Jean-Marie Marandin)

L’exposition est accrochée dans le hall d’entrée et la salle de lecture de la médiathèque, ce qui ne la dessert en aucune manière. En effet, les volumes sont généreux, baignés de lumière naturelle, élégants dans leur minimalisme fonctionnel. Chaque panneau peut exister pour lui-même tout en résonnant avec les autres d’un bout à l’autre des vastes salles par-dessus les rayonnages de livres. La médiathèque au 7 rue Alfred Giry à Romainville est à 5 minutes de la (nouvelle) station de métro Serge Gainsbourg. Elle se termine le 15 février : il reste peu de temps pour la découvrir.

Jean-Marie Marandin