Une vue générale de l’exposition (Cl. Claude Bureau)
Exposition biennale de la
« Jeune Gravure Contemporaine »
8 février – 1er mars 2023
Mairie du VIe arrondissement
78 rue Bonaparte 75006 Paris
Suivant une mode maintenant bien répandue parmi les organisateurs d’expositions annuelles, biennales ou triennales, c’est à travers ce thème que l’association « Jeune Gravure Contemporaine » a convié ses sociétaires et leurs invités à élaborer leur participation pour sa traditionnelle biennale au salon du « Vieux Colombier » de la mairie du VIe à Paris. Une part des cimaises est aussi consacrée à une petite rétrospective en hommage à un de ses sociétaires et ancien président récemment disparu : André Béguin.
Boire à travers une paille est enfantin et anodin, boire de travers peut s’avérer dangereux voire fatal. Marcher à travers une forêt apaise les tourments, marcher de travers augure mal de sa bonne réputation. Regarder à travers des lunettes semble habituel, regarder de travers son prochain demeure toujours inamical. Et, ainsi de suite. Le visiteur, prévenu par ce jeu aux multiples entrées et significations, s’attend donc, au cours de sa déambulation attentive dans la vaste salle et son promenoir en mezzanine, à de nombreuses transcriptions graphiques de ces jeux de mots. Souvent le fil est bien ténu entre la contrainte imposée et les propositions formelles. L’accrochage soigné donne cependant toute sa place à l’univers personnel de chacun des artistes présents grâce au nombre de leurs estampes exposées. Il ne reste plus qu’à laisser son regard capter celles qui retiennent la vigilance et l’émotion.
Les triptyques de Caroline Garcia et Rosa Burdeos (Cl. Claude Bureau)
Les planchettes de Caroline Garcia toutes empilées de travers en équilibre précaire passent à travers trois grandes pages blanches infiniment. Les paysages à la dérive de Line Sialelli s’écroulent de travers sur la gauche où des lévriers féroces tentent de pister toute une faune réfugiée au travers d’un entrelacs de branchages tandis qu’un pauvre randonneur lutte pour échapper aux vagues tourbillonnantes qui tranchent celui où il marchait. On peut passer au travers des noirs arcs en plein cintre des obscurs tunnels mémoriels de Pascale Simonet sans rompre le fil d’Ariane rouge qui les traverse. Dans son style minimal Anne Paulus pose de travers un disque blanc à peine parsemé de constellations noires au travers duquel un faisceau de traits brisés en verre transparent luit.
Le panneau de Toshiko Hishida (Cl. Claude Bureau)
Toshiko Hishida manie avec virtuosité les transparences de ses encres au travers d’objets quotidiens : verres et vases où se jouent les diffractions de la lumière. Les plaques de carton gravé multicolores de Dominique Moindraut toutes juxtaposées de travers au centre de trois plages blanches défient les certitudes orthogonales du monde carré qui les supporte. Il faut savoir gré à Nicolas Sochos d’avoir invité Paul Diemunsch qui regarde de travers ses semblables d’hier et d’aujourd’hui dont le burlesque et le tragique s’entremêlent dans des mises en scène picaresques aux traits acérés et sûrs. Enfin, les créatures hallucinées et dés-ailées de Violaine Fayolle s’égaillent à travers les frises, cintres et portants de ses petits théâtres découpés en une poétique partie de cache-cache. Comme le rappelle le très documenté catalogue de l’exposition, la qualité formelle et la probité technique sont donc de nouveau au rendez-vous de ce presque centenaire événement stampassin.
Claude Bureau