Journées de l’estampe

Une des allées de la place (Cl. Claude Bureau)

Place Saint-Sulpice 75006 Paris
3 et 4 juin 2024

Après la Fête de l’estampe, chaque 26 mai, les « Journées de l’estampe » de la place Saint-Sulpice sont un rendez-vous parisien à ne pas manquer. D’autant plus qu’en ce printemps 2024 particulièrement pluvieux elles se déroulèrent sous un ciel ensoleillé auquel les quatre évêques de la fontaine de la place ne sont peut-être pas étrangers. Une foule dense se pressait donc dans les allées de cette foire-exposition où l’on pouvait trouver sous chaque toile blanche de quoi satisfaire sa curiosité ou ses goûts dans la diversité des manières et des inspirations – quelquefois très proches d’une brûlante actualité – que propose l’estampe d’aujourd’hui, et sans doute de s’offrir là le tirage que son regard avait élu.

L’édition 2024 sera marquée certainement par un renouvellement et un rajeunissement des exposants, pour preuves, s’il en était besoin, de la vitalité de l’art de l’estampe. Se retrouvaient là avec les artistes stampassins, sous la protection des deux grandes tours devenues blanches qui signalent la place aux Parisiens et aux touristes, les institutions, les ateliers et les associations qui jouent un rôle dans la diffusion, la promotion ou la création de cet art. Sans pouvoir les citer tous ; on peut en signaler quelques-uns : le fidèle atelier-musée « ETR balistic » d’Arcueil, « Le bois gravé » qui présentait son dernier opus consacré à Jean Lodge, « Ombre et lumière » qui rassemble sculpteurs et graveurs dans l’exposition « Passerelle des arts », les ateliers d’art de la Ville de Paris, la société « Charbonnel » fournisseur d’encres, d’outils et de matériel pour gravure avec une petite presse en démonstration, Matthieu Coulanges devant le stand duquel un public toujours dense se pressait pour choisir ses outils faits main, etc.

Le stand de la Société des peintres-graveurs (Cl. Claude Bureau)

La « Société des peintres-graveurs », présidée depuis peu par Claire Illouz, tenait pour la première fois un stand place Saint-Sulpice. La société présentait au public son édition 2023. Il s’agit là d’une des plus anciennes associations stampassines. Fondée en 1889, comme l’explique sa secrétaire administrative, Claire Spinosi, elle édite chaque année trois estampes gravées par trois artistes choisis parmi ses quarante artistes membres titulaires au bénéfice de ses cent amateurs d’estampes membres honoraires et ce pour la modique somme de 260 euros de cotisation annuelle. Une occasion pour un amateur éclairé de se constituer au fil des ans une belle collection d’estampes. Pour en convaincre le public, outre l’édition de l’année, étaient accrochés pour les accompagner quelques tirages d’antan de premier choix.

Le stand d’Imagim (Cl. Claude Bureau)

Autre nouveauté de cette édition, l’absence de podium sur la placette centrale où naguère des présentations spectaculaires attiraient le public comme la grotte d’« Ava, femme Cro-Magnon » d’Erolf Totort ou la grande volière de « Carton extrême carton », par exemple. Plus modestement sur cette même placette un grand stand était consacré à « Imagim », un espace qui se veut, comme le précise Christian Massonnet : « …un creuset pour la création d’œuvres dans lesquelles l’image imprimée constitue une composante structurante et signifiante… »

La remise des prix (Cl . Violaine Fayolle)

Devant ce stand, Manifestampe tenait une grande table ouverte heureusement sous les rayons du soleil. Autour de cette table, le lundi en fin d’après-midi, le nouveau président de la fédération, Luc-Émile Bouche-Florin, remit, devant le jury composé de Marie Akar, Bérengère Lipreau et Claude Batisse, un large cercle d’amis, ainsi qu’un public réjoui, leur prix aux cinq lauréats de la bourse de la Fête de l’estampe : Claire Legal, Léa Guerchounow, Alexandre Otélé, Jeanne Romano-Cotelli et Narjis Sbai. Ce prix 2024, doté par Manifestampe et le « Géant des Beaux-arts » de 200 € et 300 €, était destiné à distinguer parmi les dossiers reçus d’une cinquantaine de candidats des jeunes et nouveaux talents stampassins. Ainsi ont été inaugurées ces deux belles journées de l’estampe tournées vers l’avenir.

Claude Bureau

La constellation Gustave Doré

Gustave Doré, La Banduria, encre et fusain

Une traversée dans l’édition illustrée au XIXe siècle
Galerie Heitz / Palais Rohan
2 place du Château 67000 Strasbourg
25 avril au 15 juillet 2024

Comme son sous-titre l’indique, l’exposition est essentiellement consacrée au livre illustré, car elle s’inscrit dans la célébration de Strasbourg désignée par l’UNESCO comme « Capitale mondiale du livre 2024 », ainsi que dans les 9e Rencontres de l’illustration. On se rappelle que, bien après Gustave Doré, la ville s’enorgueillit de la naissance en ses murs de Tomi Ungerer, qui y a aussi son propre musée1.

Je suis sorti de cette exposition ébloui et, pour une fois, pas encore épuisé car les dimensions en sont raisonnables. (Il faut que les organisateurs des expositions d’estampes comprennent que ces images ne se regardent pas d’emblée comme des tableaux, mais avec patience et longueur de temps.) Ébloui par le talent, l’invention, l’imagination débordante, l’humour, le sens du macabre et du fantastique proposés par Gustave Doré. Fort heureusement, nos ancêtres n’étaient pas plus malins que nous, qui, en rejetant des divers salons en vogue Doré comme peintre, l’avaient en quelque sorte repoussé vers l’illustration, exercice dans lequel il piétine, écrase, anéantit quasiment tous les autres, avec une fougue et un brio dont aucun de ses émules n’était capable. On est évidemment loin des gribouillis, aussi sympathiques soient-ils momentanément, de Hartung ou de Soulages, loin de l’oblique bleutée inlassablement répétée de Geneviève Asse, on est dans le récit, le rêve ou le cauchemar, dans le divertissement, dans ce qui image l’histoire même si elle n’est qu’anecdotique.

Sont montrées les influences subies par Doré : Grandville, Töpffer, Victor Hugo, d’autres encore, et celles qu’il a eues sur ses contemporains et ses suiveurs, y compris Van Gogh. Le regard du visiteur a largement de quoi travailler, s’amuser, se réjouir de ces réciprocités. Il y a aussi quelques morceaux de bravoure, tel ce magnifique dessin en couleurs où l’on voit le « petit » Pantagruel faire joujou avec un troupeau de vaches (au Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg), ou La Banduria, sorte de guitare dont joue un nain digne de Luis Buñuel, grand dessin au fusain et à l’encre (ibidem). Un régal.

Gustave Doré, Pantagruel et les vaches allaitantes, première pensée,
crayon, encre, aquarelle et gouache (détail)

Pantagruel et les vaches allaitantes, bois debout d’après Doré
par Florentin Jonnard

Il est vrai que Doré a été admirablement servi par d’exceptionnels techniciens de la gravure en bois debout2 (ou de bout), un procédé qui demande, là encore, une habileté hors du commun, une compréhension des sujets proposés comme symbiotique à l’œuvre dessinée au lavis d’encre de Chine, à la plume et à la gouache par l’illustrateur. L’exposition montre bien ces transmissions, car, grâce aux collections de Strasbourg et à de nombreux prêts extérieurs, beaucoup de ces dessins sont présentés, de même que plusieurs bois non gravés qui ont été préservés par les amateurs.

Il ne s’agit donc pas seulement d’un hommage à Gustave, c’est aussi une accumulation de compliments à l’égard de ses graveurs. Ce qui n’est que justice, car ce sont eux qui l’ont fait vivre jusqu’à nous et le feront encore pour nos descendants.

Si l’on ignore, probablement pour toujours, le nom des graveurs qui ont permis la diffusion des dessins de Dürer (pour l’Apocalypse, etc.), si les artisans japonais qui ont travaillé d’après les subtiles compositions des Hokusaï et autres Hiroshige, on peut retenir les noms de Héliodore Pisan (le préféré de Doré, et son ami), de Jean Gauchard, de Charles Barbant (qui est loin de l’être), de Théophile Hildibrand, de Charles Maurand, d’Adolphe François Pannemaker, et de bien d’autres encore.

C’est par cette image (du moins le dessin original conservé au musée d’Orsay) illustrant le Corbeau de Poe (on est très loin de Manet) que se termine l’exposition (voir ci-dessous).

On les retrouvera dans le fort beau catalogue de la manifestation, très bien illustré, auquel ont participé de nombreux savants, avec en tête Franck Knoery, conservateur de la Bibliothèque des Musées de Strasbourg et commissaire de l’exposition3. On relève les noms de Laurent Baridon, professeur d’histoire de l’art à l’Université Louis Lumière Lyon 2, de Ghislaine Chagrot et Pierre-Emmanuel Moog, qui s’occupent de Doré et de Charles Perrault à la BnF, de Valérie Sueur-Hermel, conservatrice générale à la BnF, qui parle du bois de teinte, de François Fièvre, de Tours, qui étudie les relations entre Doré et le nigromaniériste anglais John Martin, de Kathrin Yacavone, spécialiste de la photographie, du Dr Eric Zafran, historien de l’art, et de Philippe Kaenel, commissaire de l’exposition qui avait eu lieu au musée d’Orsay en 20144.

Maxime Préaud

1 – Attention, ville « écolo ». Si vous ne connaissez pas les lieux, ne vous aventurez pas en voiture, c’est l’enfer (ni Dante ni Doré n’y sont pour rien). Tout est mal indiqué, visez la cathédrale.
2 – Qui s’imprime bien sur papier couché.
3 – Franck Knoery, dir., La constellation Gustave Doré. Une traversée dans l’édition illustrée au XIXe siècle, Strasbourg, Les Musées de la Ville de Strasbourg, in-4°, 280 p., 250 illustrations, 45 € (c’est un peu cher, mais ça vaut le coup, et en plus on peut le lire en ligne, pour ceux qui aiment ça).
4 – Doré : l’imaginaire au pouvoir : [exposition, Paris, Musée d’Orsay, 18 février-11 mai 2014, Ottawa, Musée des beaux-arts du Canada, 13 juin-14 septembre 2014] / [catalogue] sous la direction de Philippe Kaenel ; [textes de Erika Dolphin, Côme Fabre, David Kunzle, et al.], Paris, Musée d’Orsay ; Flammarion ; Ottawa, Musée des beaux-arts du Canada, 2014.

Quatre toqués de la gravure

Le Four Pontet (Cl. Gérard Robin)

Le Four Pontet
5, Quai de la Sèvre 79460 Magné
24 mai au 5 Juin 2024

Nous sommes en Nouvelle Aquitaine, près de Niort dans le Marais poitevin, à Magné. Dans un lieu dit « Four Pontet », une ancienne poterie transformée en espace culturel, animé par l’« Association des amis du Four Pontet ». Là où l’esprit d’un ancien, Jean-Claude Daroux (1942-2023), que j’avais rencontré en juin 2013, vibre sans doute toujours. Il parlait souvent de gravure, bien sûr dans son atelier mais aussi au travers d’une biennale internationale de l’estampe gravée, qu’il créa ici même et qui a rayonné sous sa houlette dans toute la région, et dont on espère qu’elle se poursuivra. Dans un hommage fait lors de son décès, il fut dit du lieu que « Le Four Pontet devint […] un creuset où graveurs confirmés mais aussi graveurs en devenir présentèrent dans sa diversité au public cet art assez méconnu dans une approche exemplaire de ce que devrait être l’Art, un joyau pour tous. » Et de conclure : « Cette vocation est dorénavant l’ADN du Four Pontet. »

Aujourd’hui, pour fêter la Fête de l’estampe 2024, un autre événement, cette fois insolite, se déroule dans ce riche lieu, vivifié par l’intervention de trois mousquetaires (ils sont bien sûr quatre, tous « toqués » de gravure), des bretteurs qui ont troqué leur rapière pour d’autres armes plus aptes à s’attaquer, cette fois, à la matière, qu’elle soit métal, pierre, ou gélatine… Il y a là : Dominique Bréard, graveur et sculpteur sur pierre ; Michèle Joffrion, praticienne de la manière noire au berceau sur cuivre ; Daniel Leruste-Marhorel, passionné de photographie ancienne, en particulier d’héliogravure et de mordançage ; et Rémy Joffrion alias Rem, buriniste de cœur et fin connaisseur de la taille-douce sur métal. Une rencontre inattendue sous la bannière de l’estampe. Le thème partagé est symbolisé par le mot « gravure », celui-ci échappant ici à la définition traditionnelle, mais s’imposant dans la démarche de chacun.

Nous voici donc dans l’espace du « Four Pontet », devenu depuis 1998 galerie d’art. Laquelle nous accueille avec des murs-cimaises en pierres apparentes, avoisinant un superbe four en briques à deux niveaux et, dominant un beau carrelage de terre cuite vernissée, d’épaisses solives brunes qui séparent de l’étage supérieur. Un lieu qui a déjà une âme, façonné par son passé d’artisanat et un présent déjà florissant de belles expositions où se succèdent peinture, sculpture, gravure, photographie et autres curiosités locales. Ce 24 mai 2024 est soir de vernissage, pour découvrir une « gravure » dans tous ses états. Et le public est là, nombreux, pour s’immerger dans l’imprévu d’un ensemble très divers dans leurs principes d’œuvres d’art, graphiques ou plastiques, que seul réunit dans leurs différences le titre de l’exposition, émanant de « toqués » de gravure…

D’abord la plus primitive dans son histoire mais toujours actuelle, celle de la pierre naturelle que l’outil sait mettre en forme et polir, sculpter et graver, mais où l’artiste niortais, Dominique Bréard, en toute simplicité, a fit sienne cette interrogation : « La poésie circule dans l’air familier de nos vies, alors pourquoi ne pas graver sa trace dans la matière ?… ». Une empreinte d’écriture choisie, porteuse de sens, qui est en symbiose avec la forme minérale qui lui est destinée, et qui la porte avec éclat. Des créations que l’artiste se plaît ensuite, semble-t-il, à soumettre à l’épreuve du temps et de l’érosion. Une gravure destinée, donc, à se transmettre au cours des âges, porteuse de signes « qui orientent et nous rappellent le sens poétique de la vie. » Une philosophie créatrice, qui ne peut que toucher le regard et l’esprit du spectateur. De la belle ouvrage !

Salle du rez-de-chaussée (Cl. Gérard Robin)

À la blancheur de la pierre succède, en cimaises le noir velouté d’une manière de gravure sans équivalent, où la lumière va naître pour créer la teinte. C’est le domaine du « mezzo-tinto » et de Michèle Joffrion, dont la maîtrise du procédé est extrême : celle du berceau, créateur de l’obscurité primaire qui sera génératrice de vie, et celle des grattoirs et brunissoirs, qui feront jaillir et moduleront la clarté ; chaque instrument est un choix délibéré qui donne accès au rendu désiré. Il n’y a pas de surprise, en son esprit, dans le rendu graphique final. Tout est voulu, en cohérence avec son imaginaire créatif, avec les visions, fruits d’intenses réflexions, qu’elle veut transcrire. Un travail d’accouchement que l’on sait chaque fois difficile, mais qui fait naître des estampes qui, naturellement, ne peuvent que faire vibrer la corde sensible du spectateur, quelles que soient ses affinités de goût. Et le portraitiste Ludwig von Siegen (1609-1680), inventeur du procédé, ne renierait pas, à n’en pas douter, l’excellence de l’expression non figurative des estampes de Michèle.

Après le noir & blanc, la couleur. Daniel Leruste-Marhorel, quant à lui, m’a conduit à reprendre ma bible sur la « Chimie photographique », écrite par l’ingénieur chimiste Pierre Glafkidès, et qui accompagna mes études à l’École Louis Lumière, dite « Vaugirard », à Paris. On y parle notamment de mordançage, cette technique visant à établir à l’aide d’un mordant un pont chimique entre une gélatine argentique (ou autre matière) et un colorant. Ce qui permettait des « virages » d’épreuves photographiques « noir et blanc », dans le but de leur donner une couleur dominante.

“Les Chevaux du Vent” – Daniel Leruste-Marhorel gravure photographique – 33 x 46 cm (1998) (Cl. Maïté Robin)

Le procédé fit l’objet de recherches picturales de la part de photographes comme Jean-Pierre Sudre (1921-1997) ou encore Denis Brihat (1928), lauréat du prix Niepce 1957. Ce qui donna naissance à une manière innovante de création ou de métamorphose picturale originale, sans lien avec une quelconque prise de vue. Daniel s’en est approprié le savoir-faire, l’appelant « gravure photographique ». Sans entrer dans des détails fastidieux, disons que le principe consiste à utiliser une photographie argentique noir et blanc sur papier, développée selon le procédé classique, que l’on plonge dans une solution de mordançage, dite « eau céleste » (du fait de sa coloration bleue). Une action qui fragilise l’adhérence de la gélatine, plus ou moins selon la force du bain, jusqu’à former des poches. Avec la pointe d’un pinceau et sous un mince filet d’eau, ces poches crèveront. Il sera alors possible de déplacer les divers éléments sur le papier pour créer ou composer une image nouvelle au gré de son imagination. Une mise en couleur peut se faire en la plongeant dans un révélateur puis en l’exposant à l’air, initiateur d’une oxydation de l’image. La coloration peut être générale, ou partielle en protégeant les parties non concernées avec un vernis. Selon la concentration des bains ou leur formule, le virage peut aller du jaune clair au rouge intense. Chaque œuvre est unique.

Une action propice à l’exaltation de l’imaginaire, pour qui en a la maîtrise, et le présent résultat, à la vue des épreuves en cimaises, est superbe, passant du figuratif au non-figuratif, ou mixant les deux, offrant une liberté d’expression infinie… Les œuvres sont, qui plus est, accompagnées de textes poétiques qui enrichissent la vision, interpellant Ovide, Théophile Gautier, Edmond Rostand, Raymond Queneau,… et l’ami Claude Matillon, illustrateur textuel de nombre d’œuvres.

Dernier mousquetaire, Rémy Joffrion, alias Rem, le d’Artagnan du burin, mais graveur protéiforme qui connaît bien tous les arcanes de la taille du métal, et qui s’est illustré, avec son ami François Defaye, dans l’aventure dite « au fil de la taille-douce », montrant une grande connaissance des manières, de l’affûtage et de l’usage des outils, de l’emploi des encres et des papiers, des réglages de la presse. D’ailleurs, lui et Michèle feront des séances de démonstration d’impressions à la presse de plaques aux techniques différentes, argumentées de leur connaissance de celles-ci et complétées par une vitrine présentant aux visiteurs l’outillage classique du graveur.

Quant à Rem l’artiste, il présente en cimaises de belles gravures, où la poésie peut rencontrer l’humour, et où voisine aussi un couple d’estampes didactiques, avec un burin sur cuivre, « Harmoniques » (planche et tirage), et une eau-forte sur zinc, « Écho d’Harmoniques » (planche et gaufrage). Le talent est là, au travers de nombreux burins (mais pas que…), dans des gravures porteuses de singularité dans leur expression.

De gauche à droite : Dominique Bréard, Rem, Daniel Leruste-Marhorel,
Michèle Joffrion (Cl. Maïté Robin)

À signaler l’installation collégiale présentée ci-dessus, composée de la manière noire de Michèle : « Rêverie », agrandie photographiquement et traitée chimiquement par Daniel, pour un transfert de la gélatine porteuse de l’image sur une pierre découpée et gravée de quelques vers d’Arthur Rimbaud par Dominique, avec au centre la planche originelle aciérée par Rémy. La marque fusionnelle du quatuor dans la conception de leur orchestration graphique !

Merci à ces « quatre toqués de la gravure », artistes de passion, pour leur présence active et particulièrement conviviale, en cette douzième Fête de l’estampe. Ils excellent aujourd’hui dans des procédés issus des temps passés, voire actualisés, participant en cela à la grande vitalité de l’estampe contemporaine. S’y ajoute la présence virtuelle évoquée lors du vernissage par Michèle et Rémy, d’un certain professeur de gravure et artiste niortais qui les initia à cet art de la taille-douce, François Verdier, grande personnalité locale, dont c’est bientôt le dixième anniversaire de la disparition. Et bravo aux « Amis du Four Pontet » pour l’organisation de tels événements, dans un écrin culturel au demeurant exceptionnel. À quand la prochaine biennale d’estampes !… 2025 ?

Gérard Robin